Le souffle révolutionnaire qui parcourt le monde arabe a surpris tout le monde, y compris la mouvance islamiste radicale et les organisations terroristes. Au Maghreb, la chute du régime de Ben Ali et les réformes au Maroc ont d'abord déstabilisé AQMI qui s'est trouvée marginalisée par rapport aux manifestations populaires, avant que la chute inéluctable du colonel Kadhafi ne galvanise les combattants convaincus que la solution face aux régimes dictatoriaux passe par les armes. En Algérie, le mois de ramadan 2011 a été le plus meurtrier depuis la création d'AQMI en 2006. Jamais l'organisation de Droukdal n'a mené autant d'attentats-suicide en un laps de temps aussi court. Le « printemps arabe » constitue indéniablement un tournant car l'avenir de l'organisation terroriste dépend intégralement de son issue. Cet article propose un état des lieux de l'organisation à l'heure de ce grand chamboulement sociopolitique et stratégique.
Cet article montre que l'organisation Al Qaïda au Maghreb islamique s'est, selon le schéma d'une organisation complexe, parfaitement inséré dans l'environnement social et économique du Sahel ce qui rend très difficile la possibilité de l'en extraire. En effet, depuis le début des années 2000, les phalanges de l'AQMI ont tissé des liens familiaux avec les tribus locales, se sont impliquées dans les trafics en tout genre de la région leur permettant ainsi de déployer leurs bases arrières dans le nord-Mali. Face à cela, l'Algérie, puissance régionale, avait suivi une stratégie d'endiguement plutôt qu'une intervention afin d'éviter un enlisement, misant sur les acteurs locaux afin d'enrayer la menace AQMI. Aujourd'hui les conséquences de la chute du régime de Kadhafi et l'effondrement du gouvernement malien remettent en cause cette stratégie et nécessite une coopération régionale et internationale accrue afin d'enrayer la montée en puissance de l'AQMI et de ses affiliés.
Le déploiement d'Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI) dans le Sahel s'est fait grâce à une habile stratégie de socialisation dont l'un des axes principaux était de s'imbriquer dans les trafics en tout genre dans la région, notamment de celui de drogue. Ceci a été facilité par la présence dans le Sahel d'États faibles, d'un haut niveau de corruption et de la pauvreté extrême des populations locales. Pour autant, s'impliquer dans ce trafic n'a pas été sans conséquences sur AQMI puisque certains chefs de brigades et combattants refusaient de s'impliquer dans celui-ci car il allait selon eux à l'encontre des préceptes de l'Islam. Finalement et bien que ce trafic représentait des revenus importants pour AQMI, sa source principale de revenus semble provenir des prises d'otages d'occidentaux.